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Les villes à travers les documents anciens

Saint-Flour dans le Cantal


St Flour, dans le Cantal, vers 1825 - reproduction  et trairements  © Norbert Pousseur
Saint Flour, gravure dessinée par Delaval,
extraite du Nouveau voyage pittoresque de la France - Ostervald -1827
(collection personnelle).

Voir aussi la département du Cantal en 1883


Texte extrait du Guide pittoresque du voyageur en France, 1834

FLOUR (SAINT-). Ville ancienne. Chef-lieu de sous-préfecture. Tribunaux de première instance et de commerce. Collège communal. Société d’agriculture. évêché. Bureau de Poste. Relais. Population 6,464 habitants.

Saint-Flour, que l'on aperçoit de très loin, est construit sur un plateau basaltique, et tire son nom de saint Flour, premier évêque de Lodève, qui, après avoir prêché l'évangile dans les montagnes d’Auvergne, mourut vers l’an 389 sur le mont où existe aujourd’hui la ville, désigné alors sous le nom de Mons Indiciacus, à cause d'un phare ou signe indicateur qui servait de guide aux voyageurs.
Les matériaux dont se compose le sol de cette ville, leur nature, leur forme, décèlent une partie de sa terrible histoire. Un torrent de matières enflammées, sorti des flancs volcaniques des monts du Cantal, parcourt un espace de cinq lieues, s'arrêta où il trouva un obstacle à son cours s’y refroidit, et laissa une énorme masse de basalte, curieux  monument de l'une des plus grandes convulsions du globe. Bientôt les eaux courantes dégarnirent le terrain qui avait servi de digue au torrent volcanique ; la masse basaltique résista et se maintint telle qu'on la voit actuellement, avec la différence qu'y ont apporté les œuvres de la civilisation. Cette masse est couronnée par un vaste plateau où se distinguent les extrémités régulières des colonnes prismatiques qui la composent, et où est bâtie la ville.

Si l'on en excepte le côté qui regarde l'ouest, où le volcan du Cantal a fait irruption, et une petite étendue qu'occupe l'avenue de Murat, cette masse est partout escarpée et coupée à pic. Sa hauteur au-dessus du sol inférieur est d’environ soixante-seize pieds. Pour monter du faubourg à la ville, on a pratiqué, autour de la montagne, un fort beau chemin en rampe : pour le tracer, il a fallu entamer un massif immense de basaltes dont les colonnes bordent la route.
On ignore l'époque des premiers établissements faits sur ce rocher. On sait seulement que dans les temps anciens il était désigné comme un lieu de rendez-vous ou un signal pour les voyageurs égarés.

Saint-Flour fut élevé à la dignité épiscopale, et commença dès lors à prendre l’aspect d’une cité : par lettres du mois de janvier 1372, Charles V accorda aux habitants une charte de commune et des privilèges.

Saint Flour, sur son piton, vers 1850 - reproduction  et trairements  © Norbert Pousseur
Saint Flour, sur son piton
extraite du La France illustrée - V.A. Malte-Brun - 1855
(collection personnelle).

Il y a plusieurs églises et monuments à Saint-Flour, qui méritent d'être cités : la cathédrale, la Récluse, au faubourg, bâtie par saint Odilon en même temps que le pont, et qui possède deux arcs à plein cintre de l'austère roman ; le couvent des jacobins, en 1353 ; le collège des jésuites, fondé par Annet de Fontanges, en 1590, et enrichi de douze mille livres par Marie de Brezons, en 1641 ; le couvent de la Visitation, fondé par Charles de Noailles, en 1625, et doté par Mlle d'Alègre, et dont la communauté, nouvellement rétablie, s’applique à l’instruction des jeunes personnes ; l'établissement des sœurs de saint Vincent de Paul, qui instruisent gratuitement les pauvres et soignent les malheureux malades ; le séminaire, très beau bâtiment avec une belle église, des terrasses et un superbe jardin en amphithéâtre dont la vue s'étend vers l'est et le midi ; le palais épiscopal ; l'hôpital, qui domine sur la promenade, bel et vaste édifice bien aéré disposé pour recevoir un grand nombre d‘infirmes et de vieillards. La promenade publique, à laquelle on peut reprocher d'être largement dessinée pour la population à laquelle elle est destinée, est néanmoins fort belle, bien plantée, entourée de parapets, et domine, en forme de terrasse, sur une suite de collines vers le nord et l'est, dont la vue est variée et pittoresque.
Saint-Flour doit presque tous ses établissements utiles ou d'agrément à Paul de Ribeyre, son évêque vers le milieu du XVIIIe siècle, qui n'épargna ni soins ni dépense. Il fit bâtir l'hôpital, le séminaire, restaurer le collège, ouvrir une communication avec la grande route, et en même temps décorer cette entrée par un beau portique sur lequel le corps municipal fit placer les armes du prélat avec l'inscription suivante, de la composition de Du Belloy :

De Ribeyre en ces lieux tu vois le moindre ouvrage ; Compter nos monuments,  c’est compter ses bienfaits. De l'église et du pauvre il accroît l'héritage, Et lègue à ses parents les heureux qu'il a faits. 

Le commerce de Saint-Flour consiste en grains, cuirs tannés dans le faubourg, fabrication d’orseille (substance colorante), de colle-forte, d’étoffes communes, dentelles dans le genre de celles d'Aurillac ; poteries, qui passent pour les plus belles et les plus solides du Cantal ; cuivres travaillés, et un assez grand détail pour îa consommation des environs. Le faubourg, situé au bas du rocher, présente plus d’activité que l’intérieur de la ville ; c’est là que passent la route de Perpignan et celles qui la croisent. On y jouit d'une température plus douce et des avantages de la rivière, qui force fréquemment les habitants de la ville à descendre et remonter péniblement le rocher, dont les sources sont peu abondantes.

Saint-Flour est la patrie de Pierre Coutel, président du grand-conseil sous François Ier ; de Gilbert Jovin, jésuite, connu par ses poésies lyriques ; du poète Jean Pogheolat ; de M. Buirette, plus connu sous le nom de Du Belloy.

A 13 lieues et demie d'Aurillac, 19 lieues de Mende, 120 lieues. de Paris. 
Hotels Amagnat, Aubertat, Delcros, Missonnier.

St Flour, dans le Cantal, en 1830 - reproduction  et trairements  © Norbert Pousseur
Saint Flour, gravure dessinée par Doussault
extraite de La France pittoresque - Abel Hugo - 1835
(collection personnelle).

 

Histoire détaillée de Saint Flour
(texte de M. Charles Cassou, extrait de Histoire des villes de France d'Aristide Guilbert - 1853)

A Saint-Flour, nous sommes au cœur de la haute Auvergne ; rien de plus sombre et de plus désolé que son sol ; tout y retrace l’antique conflagration des monts Cantal, tout y explique son nom de Saint-Flour la Noire : l’aspect de ses maisons et de ses murs construits avec le basalte des rochers, les teintes assombries des montagnes volcaniques qui l’encadrent. On ne sait pas à quelle époque remontent les premiers établissements de Saint-Flour, mais il paraît que de temps immémorial le mont sur lequel s’élève maintenant la ville était un lieu d’étape ou de rendez-vous pour les voyageurs et les bergers qui traversaient ces contrées. Il y avait sans doute une auberge et aussi un fanal pour éclairer les sentiers à peine tracés qui serpentaient au bas du mont ; aussi lui avait-on donné le nom de Mons Indicianus.

Les premiers apôtres du christianisme qui cherchaient dans les carrefours des villes, dans les avenues des routes, les hommes de bonne volonté et supportant le poids du jour, vinrent sans doute prêcher l’Évangile dans ce lieu où passaient des gens de divers pays. On ne saurait autrement expliquer comment saint Florus, premier évêque de Lodève, mourut et fut enseveli, à la fin du IVe siècle, sur le mont Indiciac. Le tombeau du saint fut honoré d’abord d’un petit oratoire, et la dévotion y attira bientôt un grand concours de fidèles ; les populations qui avaient leurs cabanes éparpillées le long des gorges des montagnes, vinrent à Indiciac se mettre sous la protection du saint, et quand elles eurent formé un petit bourg, on bâtit une église, qui, dans le XIIe siècle, fut donnée à l’abbaye de Cluny et au monastère de Sauxillanges par deux nobles auvergnats. Après l’église, on fonda un monastère, lequel reçut des dotations de plusieurs riches propriétaires des environs, et étendit à son tour sa suzeraineté sur quelques autres petites églises des environs. Le mont Indiciacus avait alors perdu sa destination, saint Flour ou Florus était l’unique objet du mouvement qui se faisait autour de son tombeau ; le bourg prit le nom du saint. A la fin du XI siècle, Odilon, célèbre abbé de Cluny, l’entoura de murailles, et y fit bâtir une nouvelle église, que le pape Urbain II vint consacrer avec plusieurs évêques, à l’issue du concile de Clermont. Dans le XIVe siècle, Jean XXII, voulant donner un second évêché à l’Auvergne, démembra de celui de Clermont tout le haut pays, et fixa le siège de sa nouvelle circonscription épiscopale à Saint-Flour.

En 1372, Charles V accorda aux Saint-Flouriens une charte de commune avec un sceau et des archives. Saint-Flour était alors la principale ville de la haute Auvergne, et l’assemblée des États s’y était réunie quelques années auparavant, pour chercher les moyens d’arrêter les pillages et les maux causés par les soldats anglais ; elle était aussi le siège d’une élection et d’une prévôté. Sa noblesse marchait sous une seule bannière et fournissait un contingent de deux cents cavaliers : c’est ce nombre qu’indique Chapelain dans l’énumération des forces qui se trouvèrent à Orléans sous les ordres de la Pucelle. La commune avait aussi sa bannière, sur laquelle elle étalait ses armes, parti d'azur et d'or semé de fleurs de lys de l'un en l'autre à la bordure dentée de gueules.

La position de Saint-Flour, au haut d’un rocher, mettait naturellement cette ville à l’abri d’un coup de main et même d’un assaut ; elle n’était accessible que d’un côté ; et encore de ce côté une double enceinte de murailles et une grande et bonne tour carrée défendaient la rude avenue qui y conduisait ; cependant elle faillit être surprise dans le temps des guerres de la Réforme. Merle, après le sac d’Ambert, rôdant avec sa troupe dans le haut pays, l’œil aux aguets et en quête d’une bonne résidence, se trouvait, dans la nuit du 9 au 10 août 1578, sous les murs de Saint-Flour : aussitôt il fait dresser sans bruit les échelles, et monte le premier, suivi de ses soldats. Un grand nombre avaient déjà pénétré dans la ville par un égout ; le capitaine, croyant en être maître, avait fait sonner ville gagnée. Cette fois encore, comme à Aurillac, on s’était trop hâté de proclamer la victoire. Les bourgeois des villes, en effet, commençaient un peu à se faire à ces surprises, tentées souvent par des bandes de moins de cinquante hommes. Le consul Brisson de Chaumette, sans perdre l’esprit, réveille aussitôt les habitants, et se mettant à leur tête, parvient à repousser les assaillants. Pour récompenser sa valeur, Henri III lui accorda des lettres de noblesse, spécifiant qu’elles lui avaient été données « pour avoir exposé sa vie ez guerres, batailles, assauts de villes ; même pour avoir, au grand péril de sa vie, dans la nuict du 9 au 10 août 1578, conservé la ville de Saint-Flour contre les invasions du capitaine Merle, chef des religionnaires ». La ville de Saint-Flour garde encore comme un trophée la trompette qui avait sonné prématurément la prise.

La nouvelle de l’abjuration de Henri IV fut accueillie avec joie dans cette ville, quoique la Ligue y eût de nombreux agents. Cent quatre-vingts députés des États se trouvèrent réunis, le 5 avril 1594, dans le palais de justice de Flour, et les consuls déclarèrent « que la volonté et disposition des habitants estoit de se remettre sous l’obéissance de Sa Majesté, et de montrer le chemin à tout le reste du païs ». Puis des commissaires allèrent prendre à domicile la déclaration de tous les notables qui n’avaient pu assister à la réunion, et un consul et trois habitants furent désignés pour porter au roi, à Paris, le serment de fidélité. « Aussi a esté délibéré, ajoutait le procès-verbal, qu’à la relevée de la présente assemblée les comparants en icelle iront tous ensemble en l’église monsieur Saint-Amable solennellement, pour faire chanter ung thédéon et rendre grâces à Dieu de l’heureuse résollution qui a été prinse à cette assemblée, à l’yssue duquel il sera faict ung feu de joye au devant de la dite église. »

Depuis cette époque, Saint-Flour suivit le mouvement général de la France vers le progrès. Un de ses évêques, Paul de Ribeyre, appartenant à une des plus anciennes familles de l’Auvergne, la dota, dans le dernier siècle, de plusieurs monuments, y fit bâtir à ses frais le collège, l’hôpital et le séminaire, fonda des chaires de théologie et une communauté de sœurs hospitalières, enfin il fit communiquer la ville avec la grande route au moyen d’une belle avenue terminée par un portique. Le corps municipal, pour reconnaître ces bienfaits, fit graver sur ce portique les armes du prélat et une inscription que les habitants avaient fait demander à leur compatriote Du Belloy, alors en grande vogue à Paris. L’auteur du Siège de Calais avait envoyé des vers, en s’excusant de leur médiocrité, et dans sa lettre il rappelait une action qui honore trop les habitants de Saint-Flour pour ne pas trouver ici une mention. Il rapportait qu’en 1770 ils avaient osé consacrer à acheter des grains pour les pauvres tout l’argent destiné à célébrer les fêtes de l’héritier du trône, et que le Dauphin, cédant à un noble entraînement de générosité, avait chargé l’intendant de l’Auvergne, le vénérable Monthyon de remercier en son nom les officiers municipaux des villes de Saint-Flour et d’Aurillac de la magnifique fête qu’ils lui avaient donnée.

Saint-Flour a perdu son élection, son bailliage, ses chapitres et son collège des jésuites, fondé en 1590 ; mais il a conservé son évêché, et il est devenu le chef-lieu du troisième arrondissement du Cantal. Un collège communal, le séminaire et la communauté des sœurs de la Visitation, dont le premier établissement date de l’année 1625, y pourvoient avec zèle à l’instruction publique. La cour d’assises se réunit dans cette ville, qui, outre son tribunal civil, a un tribunal de commerce.
Saint-Flour possède peu de monuments remarquables. L’église de la Récluse, où l’on voit deux arcs à plein cintre de style roman, l’hôpital, le séminaire et le palais épiscopal, méritent seuls quelque attention. Le centre de la ville est habité par les vieux citadins, qui constituent une espèce d’aristocratie bourgeoise ; la classe peu aisée se porte plus volontiers vers les faubourgs, où l’industrie et le commerce sont plus actifs, et où vit tout un peuple de chaudronniers, de forgerons et de tanneurs.
On fabrique à Saint-Flour des dentelles dans le goût de celles d’Aurillac, des étoffes communes et les plus belles poteries du Cantal. La stérilité du sol force une grande partie des habitants à émigrer ; quant à la population stable (vers 1850), elle ne s’élève pas à plus de 6,000 âmes : on évalue celle de l’arrondissement a environ 61,600. Saint-Flour a vu naître un hébraïssant distingué, Antoine Jourdain ; un poète peu connu, Jean Pogheolat, et l’auteur dramatique, Pierre-Laurent Buirette, plus connu sous le nom de Du Belloy.

 

Bibliographie : Gullia christiana. — Mabillon, Analecta. — Le Grand d’Aussy, Voyage en Auvergne.
— Chabrol, Coutume d'Auvergne. — Archives de Saint-Flour. — Dulaure, Description des principaux lieux de France. — Audigier, article Saint-Flour.


St Flour, dans le Cantal, vers 1840 - reproduction  et trairements  © Norbert Pousseur
Saint Flour, détail de la carte du Cantal, gravure extraite de
l'Atlas national illustrés des 86 départements et des possessions de la France - Levasseur - 1847
(collection personnelle).
Cette gravure est la même (à part le 1er plan avec les perdrix) que celle, plus haut,
publiée dans La France pittoresque d'Abel Hugo en 1835, même si, ici, le crayon est plus généreux en détails.
Celle ci-dessous est assez semblable, mais on ne voit pas de clocher à la hauteur de la route qui monte,
bien que nous soyons dans la même tranche de temps (entre 1830 et 1850)

St Flour, dans le Cantal, vers 1850 - reproduction  et trairements  © Norbert Pousseur
Saint Flour, détail de la carte du Cantal, gravure extraite de
La France et ses colonies - Vuillemin - 1851
(collection personnelle).

 

 


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