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Les villes à travers les documents anciens

Page de garde de La Bretagne de JJ Potel - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur

Saint Pol de Léon dans le Finistère vers 1840

 

Notre-Dame de Kreisker - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Notre-Dame de Kreisker à St Pol de Léon, gravure vers 1840 de Jérôme Jean Potel

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Texte et gravure
extraits de l'ouvrage "La Bretagne de Jérôme Jean Potel - édition 1844

Saint-Pol est un chef-lieu de canton de l’arrondissement de Morlaix, dont il n’est éloigné que de seize kilomètres. Placée sur une colline et près de la mer, cette ville présente un aspect riant et pittoresque. Quelques églises élevées et surtout le brillant clocher de Kreisker, lui donnent un air d’élégance qui contraste avec l’aridité du pays d’alentour.

César nomme Saint-Pol cité des Ossismiens. Nos légendaires l’appellent Occismor. Mais l’identité de cette dernière ville avec Saint-Pol-de-Léon peut être révoquée en doute. M. Kerdanet pense qu’Occismor était situé près de Lesneven, sur la limite des paroisses de Ploudaniel et de Plounéventer. C’est là, en effet, qu’il a trouvé, il y a quelques années, les traces d’une cité romaine. En tout cas, l’origine de Saint-Pol remonte à une haute antiquité: car elle existait au VIe siècle, et était toute bâtie en bois.
Saint-Pol était, avant 1789, la ville métropolitaine de l’évêché de Léon. Son chapitre était composé de seize chanoines et de quatre dignitaires. On y voit d’anciens monastères parfaitement conservés, tels que ceux des Carmes, des Minimes, des Ursulines; un Hôpital, une Maison de Retraite, un Séminaire de Lazaristes et un superbe Collège. Les bâtiments de l’Evêché, entourés de vastes jardins, sont aussi de beaux édifices.

Notre dessin donne la reproduction fidèle de la chapelle de Notre-Dame de Kreisker (milieu de la ville) et de son élégant clocher, qui a cent trente mètres d’élévation.
Albert-le-Grand attribue la construction de cette chapelle à Jean IV. Il est vrai qu’on voyait au haut du portail de l’église l’écu de Bretagne supporté par des lions, et renversé à l’antique, surmonté d’un simple casque ouvert et sans couronne ; on y voyait également les statues des douze Apôtres, dont plusieurs existent aujourd’hui, avec les armes de différents seigneurs au bas des niches. Dans le clocher, on ne remarque aucun écusson, aucune hermine, ornements qu’on n’épargnait cependant pas dans les monuments publics, depuis l’invention et l’usage des armoiries, ce qui fait croire que ce clocher remonte à une époque antérieure au moyen-âge. La tradition du pays porte qu'il a été construit par les Anglais, quand ils s’emparèrent de la Bretagne. Quoi qu’il en soit, on a tâché de l’imiter dans la plupart des flèches des environs.

Ce clocher n’a ni pilastre, ni colonne, ni statue, mais les proportions en sont exactement gardées. On l’appelait jadis Tour du Diable, nom que l’on donnait à tous les ouvrages extraordinaires de la nature et de l’art. Rien de svelte, de léger, d’élégant, comme cette tour; elle efface, au dire de tous les voyageurs, les flèches de Saint-Louis de Paris, celles qui parent Auxerre, Chartres, Strasbourg, les clochers de la Flandre, les tours de Malines même plus élevées, mais moins élégantes. Lorsqu’on 1671, Vauban vint en Bretagne, à l’aspect du Kreisker, il dit que c'était l'ouvrage le plus hardi qu'il eût jamais vu. Ces mots de l’illustre maréchal complètent l’éloge justement mérité de ce chef-d’œuvre d’architecture.

La Cathédrale de Saint-Pol-de-Léon est construite en granit ; elle fut bâtie au XV.e siècle, sur les ruines d’une autre église, qui avait elle-même remplacé la Cathédrale que Conan Mériadec, roi de Bretagne, éleva dans ce lieu au V.e siècle.
On peut y admirer, outre la rose délicate dont parle Cambry, les arcades du bas côté, la nef et surtout les boiseries du chœur et des stalles. L’architecture générale est un peu lourde. Les deux clochers ne sont qu’une grossière imitation de celui de Kreisker ; mais il y a dans l’ensemble de l’édifice une régularité qui a de la majesté, et dans les détails une délicatesse souvent pleine de grâce.
Aux pieds des marches du maître-autel est une grande tombe plate en marbre noir, dont on a effacé l’inscription. C’est là que reposent les cendres de Saint-Pol.
La Cathédrale contient encore un baptistère ou cuve de pierre, destinée au baptême par immersion, tel qu'il se conférait dans les premiers siècles de l’église.
On y voit aussi un beau tombeau en marbre blanc, c’est celui de l’évêque Visdelou ; il fut fait en 1711, par Nicolas de la Colonge.

« L’évêque, dit Cambry, couché sur sa tombe, appuyé sur le bras gauche, réfléchit sur sa lecture. Il est couvert de riches habits pontificaux ; son attitude est simple ; sa figure, sans avoir rien de noble, sans être d’une exécution parfaite, paraît ressemblante ; elle est pleine de vérité. Il a ses gants épiscopaux, ce qui a évité à l'auteur d’achever des extrémités toujours difficiles. Les draperies nom pas assez d’ampleur. Les broderies sont larges et d’un bon style. La mitre, qui ne porte sur rien, est riche de travail, sans trop de recherche.
» La tombe, d’une forme qui n’a rien de remarquable, est ornée de pilastres, sur lesquels sont placées des têtes de mort, emblème de la fragilité des grandeurs de ce monde. »

Il faut ajouter à tous ces objets curieux, conservés dans la Cathédrale de Saint-Pol-de-Léon, la cloche que le roi Marc, qui régnait en Angleterre, refusa à Saint-Pol. Ce Saint, étant passé en Bretagne en 517, et se trouvant près du comte Guyture, qui habitait l’île de Batz, des pêcheurs apportèrent au comte la tête d’un énorme poisson, dans la gueule duquel se trouva miraculeusement la cloche qui fut donnée à Saint-Pol.
Celte cloche est de la plus haute antiquité; elle a la forme d’une pyramide quadrangulaire ; ses côtés ne sont pas égaux; il y en a deux grands et deux petits. Elle a 26 centimètres de hauteur et 18 centimètres de largeur sur la base d’un de ses grands côtés, et 12 centimètres sur celle du petit côté; elle n’a point été fondue, mais bien battue au marteau.
Elle est de cuivre rouge mêlé de beaucoup d’argent. On attribue encore aujourd’hui à cette cloche des vertus miraculeuses.

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