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Les villes à travers les documents anciens

Ajaccio au 19ème siècle

Ajaccio vers 1835 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Ajaccio et un des premiers bateaux à vapeur, vers 1830, gravure de Cattaneo
extraite de La France pittoresque - Abel Hugo - 1835
(collection personnelle).


Voir aussi la département de la Corse en 1883

Texte extrait du Dictionnaire de toutes les communes de France - éd. 1851 - Augustin Girault de Saint Fargeau
(collection personnelle).


AJACCIO
, Aajacium, ancienne, jolie et forte ville maritime, chef-lieu du département de la Corse. Tribunal de 1ère instance et de commerce.  Place de guerre de 3e classe. Evêché. Collège communal. Ecole royale de navigation. Société d’agriculture

Population 11,266 habitants — Terrain cristallisé ou primitif.

Ajaccio entourée de bateaux de pêche vers 1870 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Bateaux de pêche devant Ajaccio vers 1870
extraite de la Géographie illustrée de la France - Jules Verne - Hetzel - 1876
(collection personnelle).

Quelques auteurs prétendent que cette ville fut fondée par les Lesbiens, qui lui donnèrent le nom d’Ajasso, d’après une petite ville de l’ile de Lesbos, qui existe encore près de Mitylène : les Romains l’appelaient Urcinium, à cause de la bonne qualité des vases de terre que l’on y fabriquait pour conserver le vin.
Cette ville était autrefois située plus au fond du golfe d’Ajaccio, à un mille de la ville actuelle, dont la fondation date de 1495. A cette époque, les directeurs de la compagnie de St-Georges, qui gouvernaient l’ile pour les Génois, ne se croyant pas rassurés au sujet de leurs possessions dans la partie ultramontaine de l’ile, résolurent de fortifier une bonne position, propre à servir de centre aux opérations militaires qu’une insurrection pourrait rendre indispensables. Ils cherchèrent un endroit convenable sur les bords de la mer afin de s’assurer les communications avec la Ligurie, et les fondements d’Ajaccio furent jetés sur l’emplacement où la ville existe aujourd’hui : les privilèges et les immunités accordés à la nouvelle ville y attirèrent bientôt une grande partie des habitants de l’ancienne, qui finit par être entièrement abandonnée. Cette ville avait déjà dû beaucoup souffrir pendant les excursions des Sarrasins, qui paraissent même y avoir fait quelque résidence, car on découvre encore des tombeaux qui rappellent le culte mahométan.

Ajaccio était le siège d’un évêché, qui fut établi dans Urcinium, ainsi qu’on le voit dans une des lettres de saint Grégoire le Grand, évêché qui était connu sous le nom d’Adjazzo, du temps du concile de Rome, sous Martin Ier.

Ajaccio et son fort vers 1820 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Ajaccio avec son fort, vers 1820, gravure de Baugean
extraite du Nouveau voyage pittoresque de la France - Ostervald -1827
(collection personnelle).

La ville d’Ajaccio est bâtie sur une langue de terre, vers le fond et au nord du golfe de son nom, à l’entrée d’une baie qui offre d’excellents mouillages : la citadelle occupe l’extrémité de ce cap. Cette ville, destinée à prendre de jour en jour un nouvel accroissement, est une des plus jolies et des plus agréables de l’île ; son site surtout est admirable. Ses principales rues sont larges, droites, bordées de belles maisons, et leurs pentes sont très douces. On y remarque deux places publiques, et un cours de 20 m de largeur, ouvert en partie dans le granit sur le prolongement de la roule de Bastia, qui longe la côte jusqu’au fond de l’anse ; le chemin qui conduit à la chapelle des Grecs et suit aussi le bord de la mer, sert encore de promenade aux habitants.
Le soir la route de Bastia offre l’aspect le plus animé ; les propriétaires, les marins, les vignerons, les femmes du peuple, reviennent tous par cette seule route des campagnes environnantes ; les premiers à cheval, armés et graves, les autres contents d’avoir fini leur journée pénible et d’approcher du gîte.
Le paysage a de la grandeur : à droite, on a le fond du golfe et les bâtiments à l’ancre ; à gauche, des vignobles et des bouquets d’oliviers ; au fond, plusieurs plans de montagnes sévères et le ciel de l’Italie. Du côté de la chapelle des Grecs, le tableau est entièrement différent : on découvre une assez grande étendue de mer, les montagnes qui se prolongent au sud-ouest jusqu’au cap di Muro, les îles Sanguinaires, les barques des pêcheurs qui rentrent au port ou qui en sortent, et quelquefois les bâtiments qui passent lentement devant le golfe. Vues le soir, de la chapelle des Grecs, la ville et les montagnes sur lesquelles cette charmante cité se dessine, forment un tableau ravissant.
Sur la grande place est une fontaine en marbre qui doit être surmontée d’une colonne en granit couronnée par la statue de Napoléon : le fût de cette colonne, dont la première pierre a été posée le 25 juin 1837, aura 120 m ; l’élévation du monument, statue et piédestal compris, sera de 132 m.

Ajaccio et son port vers 1870 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Ajaccio et son port, vers 1870
extraite de La France illustrée (en 5 volumes) - V.A. Malte-Brun - 1883
(collection personnelle).

Le port d’Ajaccio n’est point fermé et n’est pas susceptible de l’être ; mais le fond de la baie spacieuse sur laquelle est située la ville est un des meilleurs mouillages de l’île. La baie elle-même offre plusieurs autres bons mouillages, où les bâtiments trouvent un abri sûr contre la plupart des vents, mais qui ne sont pas tenables lorsque celui du sud-ouest se fait sentir. Le mouillage du quai est de ce nombre : les vagues amenées par le vent du sud-ouest et réfléchies par la côte opposée viennent battre le quai avec violence, et donnent une idée des difficultés qu’a dû présenter la construction de ce bel ouvrage. Tous les bâtiments se réfugient alors au mouillage des Cannes, qui occupe le fond de la baie. Excepté dans celte circonstance, les plus forts navires de commerce peuvent aborder le quai et y effectuer leur chargement.

La cathédrale d’Ajaccio, en formé de croix grecque, et surmontée d’une majestueuse coupole, fut terminée en 1585, et rappelle la belle architecture italienne de la même époque. On y montre la cuve de marbre blanc où Napoléon (né le 15 août 1769) fut baptisé le 21 juillet 1771 ; ainsi qu’un riche maître-autel en marbre provenant d’une église de Lucques, et donné par la princesse Elisa Bacciochi.

La chapelle des Grecs, située sur une éminence qui domine un horizon fort étendu, est une jolie église fondée vers le commencement du siècle dernier, par P. E. Pozzo di Borgo. On y jouit d’une magnifique vue du golfe, des îles Sanguinaires et des montagnes qui s’étendent jusqu’au cap di Muro.

Ajaccio et la maison de Napoléon vers 1830 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
A Ajaccio la maison de naissance de Napoléon, vers 1835, gravure de Rauch d'après Despois
extraite du Guide pittroresque du voyageur en France - 1838
(collection personnelle).

La maison ou naquit Napoléon occupe un des côtés d’une petite place carrée plantée aux quatre angles de quatre acacias. Celte habitation de peu d’apparence est visitée avec empressement par tous les étrangers qui abordent dans l’île. Dans le salon où Mme Laetitia, prise subitement des douleurs de l’enfantement, accoucha de Napoléon sur un canapé, on remarque un beau portrait de l’empereur en costume impérial, par Gérard. La chambre à coucher est obscure et n’a qu’une seule fenêtre. — La maison européenne de Napoléon appartenait naguère à un membre de la famille maternelle de l’empereur, qui en a fait don à la ville où est né le plus grand capitaine du siècle.

Ajaccio et la maison de Napoléon vers 1830 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
A Ajaccio la maison de naissance de Napoléon, vers 1830, gravure de Cattaneo
Avec trois garçons jouant avec un petit canon
extraite du extraite de La France pittoresque - Abel Hugo - 1835
(collection personnelle).

On remarque encore à Ajaccio le nouvel Hôtel de ville, bel édifice commencé en 1827 et non encore achevé ; la salle de spectacle ; la bibliothèque publique, renfermant 14,000 voumes ; le nouveau bâtiment des enfants trouvés ; les maisons de M. Pozzo di Borgo et du cardinal Fesch ; les casernes ; la citadelle, jolie forteresse régulière élevée par le maréchal de Thermes ; la pépinière et le jardin de botanique, qui occupent l’emplacement d'une ancienne propriété de la famille Bonaparte, etc., etc.
Sur la route de la pépinière, à gauche, est le terrain dit la Villetta, planté uniquement d’orangers et de citronniers. Les Melelli, jardin d’oliviers, autrefois propriété de la famille Bonaparte, était le lieu de prédilection de Napoléon pendant sa jeunesse ; c’est là qu’il écrivit sa lettre au comte Matthieu Buttafuoco, député de la noblesse corse à l’assemblée nationale, qui avait refusé de se réunir au tiers état et s’opposait au grand et légitime mouvement de 1789. On y remarque un antique chêne vert, à l’ombre duquel Napoléon aimait à se livrer à de profondes méditations.
Vis-à-vis Ajaccio et de l’autre côté du golfe, la tour blanche de Capitello rappelle un des premiers et des plus graves périls de la vie de Napoléon, lors de l’expédition contre les paysans corses insurgés, soutenus par les Anglais.

Patrie de Napoléon et de tous les membres de la ci-devant famille impériale.

Les bords d'Ajaccio vers 1830 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Ajaccio et sa grève, vers 1835, gravure de Rauch d'après Despois
extraite du Guide pittroresque du voyageur en France - 1838
(collection personnelle).

Fabriques de cuirs. Briqueteries — Commerce de vins, huile d’olive renommée, oranges, citrons, corail que l’on pêche sur les côtes et qui se prépare à Ajaccio, etc. — Diligences pour Bastia. Bateaux à vapeur pour Toulon et Bastia.

L’arrondissement d’Ajaccio comprend 12 cantons : Ajaccio, Bastilica, Bocognano, Evisa, Piana, Ste-Marie, Salice, Sari, Sarrola,Soccia, Zicavo et Vico.

A 112 km S.-S.-O. de Bastia, 260 km S.-E. de Toulon, dont la traversée se fait avec un seul vent en vingt-quatre heures, 1,080 km de Paris pour la taxe des lettres. — Latitude 40° 55’ 1", longitude E. 6° 23’ 49”.

 

Vue générale d'Ajaccio vers 1830 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Vue générale d'Ajaccio vers 1835, gravure de Rauch d'après Despois
extraite du Guide pittroresque du voyageur en France - 1838
(collection personnelle).

Artcle ci-dessous extrait de 'La Lecture des livres François'
'Livres de Géographie et d'Histoire imprimés en françois au seizième siècle
', - 1786 - collection personnelle
rédigé par Antoine René de Voyer d'Argenson, marquis de Paulmy (1722-1787), assisté dans cette tâche par un rédacteur professionnel, André-Guillaume Contant d'Orville.
Le sous-titre de l'ouvrage (français du seizème siècle) est trompeur : sans aucun doute, les auteurs ont utilisés leur riche bibliographie (dont le fonds est à présent celui de la Bibliothèque de l'Arsenal), mais aussi des ouvrages de leur époque (18ème siècle). En effet, par exemple, est cité ici la présence de l'évâque Doria qui a excercé à Ajaccio de 1759 à 1790,

 

La partie méridionale de la Corse n’est pas aussi étendue que la septentrionale ; elle ne renferme que cinq provinces, donc la première est celle Ajaccio, qui passe pour la meilleure de l’ile, d’où l’on tire les meilleurs vins, et où l’air est le plus sain. Elle est divisée en neuf pièves ; dont celle d’Ajaccio même est la plus intéressante.

Ajaccio est située au fond d’un golfe ; sa baie et son port sont bons et très commodes. On assure que les Rois Maures ou Sarrasins de l’île de Corse faisaient leur résidence à Ajaccio, et l’on y voit encore les ruines de leur palais. La ville n’est pas grande, mais très jolie et bien bâtie ; les rues en sont tirées au cordeau. L’air y est sain, mais les eaux n’y sont pas trop bonnes. On n’y boit que de celle de citerne ; et quand l’été est sec, on est obligé d’aller chercher de l’eau fort loin.
La fortification en est assez simple, et ne consiste qu’en une seule enceinte de murs. Il y a une forteresse ou citadelle qui a été bâtie au seizième siècle par le Maréchal de Thermes pour contenir la ville. Elle remplit médiocrement cet objet ; mais du moins elle est forte par sa situation, et baignée de toutes parts par les eaux de la mer ; aussi détend-elle le mouillage. On voit encore sur un des bastions le nom et les armes du Maréchal de Thermes. Il y a d’ailleurs dans la ville une vieille tour, que l’on dit avoir été le premier château d’Ajaccio, mais qui n’est pas avec cela fort ancienne, car la ville n’a pas toujours été où elle est à présent.
Les ruines de sa première enceinte sont au fond du golfe, à une lieue de l’endroit où la nouvelle ville se trouve actuellement, qui ne remonte pas plus haut que l’an 1438. Dans la vieille ville sont encore les ruines de la cathédrale et de l’habitation des Rois Maures.
Le plus bel édifice de l’Ajaccio moderne se nomme le Palais ; c’est où résidait le Gouverneur ou Administrateur Génois de toute la partie méridionale de l’île. La cathédrale et la maison occupée ci-devant par les Jésuites, sont, après le palais, ce qu’il y a de plus remarquable. Les couvents des Franciscains et des Capucins se trouvent dans le faubourg ; ces couvents sont vastes, et l’on s’en sert pour loger la garnison quand elle est nombreuse ; ce qui arrive souvent, parce qu’Ajaccio est regardée comme un des postes les plus importants. Non seulement l’eau est très profonde dans son port, dans sa baie, et même dans tout son golfe, mais les vaisseaux qui y entrent y sont presque à l’abri de tous les vents dangereux, et peuvent s’y retirer dans les mauvais temps.
On pêche sur les côtes voisines du corail rouge, blanc et noir, et cette production de la mer fait un objet de commerce pour Ajaccio, qui d’ailleurs en a un autre de bois taillé en planches et en poutres, et de cuirs propres à faire des souliers.

Ajaccio et sa rade vers vers 1880 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Ajaccio et sa rade vers 1880
Détail de la carte du département de la Corse par Vuillemin - 1883
Voir la carte sur la page du département de la Corse
(collection personnelle).

On prétend qu’Ajaccio est la ville nommée dans Ptolémée Oppidum Ursinium, et qu’elle doit son existence à un nommé Norax, fils du Roi Gérion, qui y conduisit une nombreuse Colonie d’Espagnols. Le plus ancien Evêque d’Ajaccio que l’on connaisse, se nommait Evandre ; il vivait au septième siècle ; S. Grégoire le Grand en fait mention dans ses Epîtres. Après l’expulsion des Sarrasins, les Seigneurs de la Corse donnèrent des terres assez considérables aux Evêques d’Ajaccio. Ils possèdent encore aujourd’hui plusieurs pieves ; mais le revenu qu’ils en retirent est médiocre. L’Evêque actuel est Génois ou plutôt Corse ; il porte le nom de Doria., et est le plus ancien Evêque de l’île. Dans la province d’Ajaccio est la pieve d’Ornano, terre très considérable, qui a donné son nom à une des plus illustres familles de l’île.


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