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Les villes à travers les documents anciens

Privas au 19ème siècle

Entrée de Privas en  1835 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Privas depuis sa campagne, vers 1835, gravure de Rauch
extraite du Guide pittroresque du voyageur en France - 1838
(collection personnelle)


Voir aussi la département de l'Ardèche en 1883

Texte extrait du Dictionnaire de toutes les communes de France - éd. 1851 - Augustin Girault de Saint Fargeau
(collection personnelle).

PRIVAS, Privatium Castrum, ville ancienne, Ardèche, chef-Lieu département de l’Ardèche (Vivarais), du 2e arrondissement. Tribunal de 1ère instance d'agriculture. Collège communal ; Cure.  Gîte d’étape. Bureau de poste. Relais de poste. Population 4,797 habitants —- Terrain jurassique, calcaire à gryphées.

Autrefois parlement de Toulouse, généralité de Montpellier, gouvernement particulier.

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Privas dans ses collines vers 1830 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Privas vers 1830, gravure de Bulluca / Bullura (? peu lisible)
extraite du extraite de La France pittoresque - Abel Hugo - 1835
(collection personnelle).

Dans le XVIe siècle, Privas était une ville extrêmement forte, dont les habitants embrassèrent le parti du prince de Condé en 1562. Le duc de Montpensier, dauphin d’Auvergne, l’assiégea à la tête de l’armée royale en 1574. Le siège fut poussé avec vigueur, mais la défense fut si opiniâtre que le dauphin fut obligé de lever le siège. Cette ville jouit de quelque repos jusqu’en 1614 ; elle était devenue, par sa belle défense et la fidélité de ses habitants, la métropole, pour ainsi dire, de l’église des protestants ; ce fut là qu’ils tinrent en 1612 un synode national de toutes les églises réformées. Dans la suite, la ville de Privas se laissa surprendre par les catholiques, et fut bientôt après reprise par les religionnaires ; puis elle se rendit à Louis XIII, qui la fit démanteler. Les protestants la recouvrèrent et relevèrent les fortifications ; Louis XIII vint en personne, à la suite du cardinal de Richelieu, pour la réduire. Le siège commença en avril 1629. Le brave St-André de Montbrun commandait la place, où se trouvait une faible garnison de douze cents hommes, que secondèrent courageusement les habitants. Le 26 mai l’assaut fut donné ; il fut terrible, et le combat dura deux heures ; enfin, les troupes royales, après avoir perdu plus de cinq cents hommes, furent obligées de se retirer. Cependant, la place n’étant plus tenable, St-André demanda une capitulation honorable, qui lui fut refusée. Une partie des assiégés se décida alors à abandonner la ville et tenta de s’enfoncer dans les montagnes ; cette troupe fut poursuivie, atteinte et massacrée. St-André se retira dans le fort de Toulon, où le manque de vivres le força, au bout de quelques jours, de se rendre à discrétion à Louis XIII, qui, froidement barbare, le fit pendre avec ses compagnons. Les habitants qui restèrent dans la place furent passés au fil de l’épée. Les maisons furent pillées et incendiées, et les fortifications rasées. Un édit de Louis XIII porta confiscation de tous les biens des habitants qui étaient restés dans la ville pendant le siège.

Les armes de Privas sont : d’argent au chêne de sinople englanté d or, posé sur une terrasse de sinople ; au chef d’azur chargé de trois fleurs de lis d'or.

Privas, vue générale vers 1850 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Privas vers 1850
extraite de La France illustrée - V.A. Malte-Brun - 1855
(collection personnelle).

Privas est dans une situation agréable, sur une colline qui domine le vallon de l’Ouvèze, à la jonction de trois petites rivières. Elle possède un hôtel de préfecture, auquel est joint un beau parc dessiné dans le genre paysager ; un palais de justice nouvellement construit ; une petite bibliothèque publique de 2,000 volumes ; des prisons remarquables par leur belle situation et leur bonne distribution ; un hospice ; un bureau de bienfaisance ; un collège, qui compte environ deux cents élèves, etc., etc.

On trouve aux environs une source d’eau minérale.

Fabriques de couvertures, étoffes de laine, soies ouvrées, organsins, trames. Distilleries d’eau-de-vie. Tanneries. Commerce de soie, bestiaux de toute espèce, cuirs, houille, etc.
Il s’y tient deux marchés par semaine, où quelques villes de la rive gauche du Rhône viennent s’approvisionner en gibier, beurre, fromages, châtaignes, truffes, etc. En hiver, ventes considérables de cochons gras.

A 39 km Sud-Ouest de Valence, 145 km Ouest -Nord-Est de Nîmes, 608 km Sud-Est de Paris. Longitude 2° 15' 32", latitude 44° 42' 33".

L’arrondissement de Privas est composé de 10 cantons : Antraigues, Aubenas, Bourg-St- Andéol, Chomérac, la Voulte, St-Pierre-Ville, Privas, Rochemaure, Villeneuve-de-Berg, Viviers.

Bibliographie. Discours véritable de ce qui s’est passé sur l’occurrence des monuments de la ville de Privas, in-12, 1621.

Les abords de Privas vers 1880 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Privas et son pont
Détail de la carte du département de l'Ardèche par Vuillemin - 1883
Voir la carte sur la page du département de l'Ardèche
(collection personnelle).

 

Histoire détaillée

Texte d'Eugène Faure, extrait de l'Histoire des villes de France D’Aristide Guilbert 1859
(collection personnelle).

L’origine de Privas se perd dans les ténèbres du moyen âge, et l’on ne sait rien des commencements de cette ville. En 1110, le pape Pascal II s’y arrêta en allant en Italie et y donna la confirmation. A cette époque, Privas faisait partie des domaines de la puissante famille de Poitiers ; elle était regardée comme la capitale de la contrée montagneuse des Bouttières. Au XVe siècle, la force de ses remparts et le courage de ses habitants en faisaient une place importante. Ce fut une des premières villes de France qui se déclarèrent pour la réforme ; dès 1560, elle embrassa le parti du prince de Condé. En 1574, François de Montpensier, dauphin d’Auvergne, commandant de l’armée royale, après avoir incendié le Pouzin, vint assiéger Privas. Mais cette ville fut secourue par Saint-Romain, un des plus vaillants capitaines des réformés, et le prince Dauphin, repoussé dans deux assauts, malgré la supériorité de ses forces, se vit contraint de lever le siège.

Les troubles qui éclatèrent en Vivarais, vers la fin de 1619, eurent pour cause le mariage de Charlotte de Chambaud, dame de Privas, veuve du sieur de Chambaud de la Tour-Gouvernet, fameux chef du parti protestant. Cette dame ayant épousé le sieur de Chyliane-Lestrange, fils aîné du vicomte de Lestrange, catholique zélé, dont elle était devenue éperdument amoureuse, les religionnaires du Vivarais s’alarmèrent de cette union, qui mettait Privas, une de leurs plus fortes places, au pouvoir d’un seigneur catholique. Sur ces entrefaites, le sieur de Chyliane-Lestrange ayant, avec quelques gentilshommes de ses amis, attaqué et dispersé une troupe de protestants qu’il avait rencontrée aux environs de Privas, les habitants de cette ville prirent aussitôt les armes. Le sieur de Brison avait à se venger du refus de la dame de Chambaud, dont il avait sollicité la main, bien qu’il fût veuf de sa fille   il s’empara donc du château de Privas, prétendant que le gouvernement lui en appartenait. Le duc de Montmorency essaya en vain de rétablir la paix entre les deux partis. Le traité, conclu sur ses instances, est rompu bientôt après ; les religionnaires se soulèvent de toutes parts, et le comte de La Voulte est obligé, en l’absence du duc, d’accourir à Privas pour désarmer les rebelles. Il mit une garnison dans le château et interdit l’entrée de la ville au sieur de Chyliane-Lestrange ; mais celui-ci, sans s’arrêter à cette défense et avec l’aide de sa femme, s’empare de Privas. A cette nouvelle, tous les religionnaires du Vivarais et des provinces voisines se rassemblent dans cette ville sous les ordres du sieur de Brison, et bloquent le château ; il ne fallut rien moins que l’arrivée de Montmorency, à la tête d’un corps de troupes, pour les faire rentrer dans le devoir.

Après le départ du duc, les habitants de Privas reprirent les armes, et, sous la conduite de Brison, ils attaquèrent de nouveau le château. Ayant fait sauter la grosse tour au moyen d’une mine, ils forcèrent la garnison que Montmorency y avait laissée, à capituler. Une fois maîtres du château, qui menaçait leur indépendance, ils le démolirent. Le maréchal de Bassompierre, sur l’ordre du roi, accourut à Privas avec un corps de troupes, contraignit Brison à lui livrer la place, et en fit raser les fortifications (1622). Le Vivarais fut alors entièrement soumis. Mais cette paix ne dura pas. En 1629, le duc de Rohan vint soulever de nouveau le Midi. Privas fut une des places du Vivarais dont Louis XIII entreprit en personne la réduction. Ayant passé le Rhône, le 15 mai, il se rendit devant cette ville, qu’il avait fait investir la veille par le maréchal de Schomberg, et en forma le siège. Le sire de Chabreilles, frère de Brison, y commandait. Mais le duc de Rohan, qui se défiait avec raison de ce capitaine, avait envoyé à Privas Saint-André Montbrun avec douze cents hommes de garnison pour en prendre le commandement. A ces troupes s’étaient joints sept à huit cents hommes armés. Le nouveau gouverneur n’avait rien négligé, du reste, pour mettre la ville en état de défense, et il en avait fait relever les fortifications.

Le 24, Louis XIII, après avoir vainement tenté de corrompre Saint-André Montbrun (il lui avait fait offrir une gratification de cent mille écus), le somma de se rendre ; mais celui-ci répondit fièrement qu’avant d’en venir là, il fallait disputer six mois. Le roi fit alors battre la ville en ruine et donner l’assaut. L’attaque fut vive et opiniâtre ; on se battit depuis huit heures du soir jusqu’à dix heures avec un acharnement égal. A la fin, les assiégeants furent repoussés et se retirèrent dans leurs quartiers, en laissant cinq cents hommes sur la place. Le lendemain, Saint-André Montbrun, sur les instances de la garnison et des habitants effrayés de ce succès, demanda à capituler. Mais le roi ne voulut accepter aucune condition ; ce qui redoubla la frayeur des assiégés. Une partie d’entre eux résolurent de profiter de la nuit suivante pour gagner les montagnes, où ils espéraient trouver un asile sûr ; mais ayant été surpris dans leur fuite, la plupart furent massacrés. Bientôt Tournon-lez-Privas et le fort de Saint-André sont emportés par les troupes royales. Montbrun se réfugie, avec le reste des habitants, dans le fort de Toulon, situé sur une montagne voisine. Mais dans le désordre et la confusion inséparables d’une retraite précipitée, ils oublièrent d’emporter des vivres ; ce qui les mit hors d’état de résister. Saint-André Montbrun, qui jusque-là s’était montré intraitable, se rendit alors au camp des assiégeants pour implorer la miséricorde du roi ; il fut arrêté aussitôt, comme prisonnier, avec quelques autres officiers qui l’avaient suivi. Deux jours après, on le conduisit à la citadelle de Valence, d’où il parvint plus tard à s’échapper. Ceux qu’il avait laissés dans le fort de Toulon se rendirent à discrétion. Au moment où les assiégeants y entraient en foule, un des assiégés mit par mégarde le feu à un sac de poudre, dont l’explosion tua ou blessa plusieurs soldats. Les vainqueurs, pensant que c’était une trahison, ou du moins feignant de le croire, firent main-basse sur la plupart de ceux qui se trouvaient dans le fort. Six cents de ces malheureux furent massacrés. Suivant le duc de Rohan, ce furent les soldats du roi qui mirent eux-mêmes le feu à cette poudre, afin d’avoir un prétexte pour égorger la garnison, comme on le leur avait recommandé.

Ainsi fut réduite cette place, la plus forte que les religionnaires eussent possédée le long du Rhône. Le siège en avait duré dix jours ; il y périt de part et d’autre un grand nombre de personnages de distinction. Le roi sauva, dit-on, la plupart des femmes, mais il livra la ville au pillage, et ses troupes l’ayant incendiée, elle fut entièrement brûlée. Non content de cette terrible vengeance qui aurait dû lui suffire, il fit pendre cent des principaux prisonniers et en envoya cent autres aux galères. On confisqua tous les biens des habitants de Privas, sans préjudice des autres peines qu’ils encoururent. L’emplacement de la ville fut donné en propriété au sieur de Chyliane-Lestrange, et le roi fit défense de la rebâtir sans son autorisation. Les malheureux Privadois restèrent ainsi sans asile, sans pain, et furent réduits à errer dans les montagnes voisines. Toutes les fortifications de la place furent démolies ; on ne conserva que le fort de Toulon, dont le commandement fut confié au sire de Chyliane-Lestrange.

Ce gentilhomme, depuis la prise de Privas, était devenu le seigneur le plus puissant du Vivarais. Enflé de sa grande fortune, il eut l’imprudence d’entrer dans la coalition formée par le duc de Montmorency contre le cardinal de Richelieu, et de soulever le pays. Le maréchal de La Force, qui se trouvait au Pont- Saint-Esprit avec l’armée royale, envoya d’abord contre lui quelques troupes auxquelles on réunit les Privadois sans asile qui brûlaient de se venger de leur ancien seigneur, auteur de tous leurs maux. Celui-ci se vit bientôt assiégé par l’armée royale dans les murs de Tournon-lez-Privas où il s’était renfermé (1632). Blessé après une résistance opiniâtre et désespérée, il tomba entre les mains de ses anciens vassaux qui en eussent fait bonne et prompte justice, si le commandant des troupes royales n’avait eu ordre de le réserver pour le bourreau. Mais ils obtinrent du moins, en manière de dédommagement, qu’on le livrât préalablement à leurs insultes. Le fier baron, garrotté comme un malfaiteur, fut entraîné par eux sur les ruines de leur ville ; là, après lui avoir prodigué toutes les injures, toutes les humiliations que peut inventer la vengeance, ils le dépouillèrent, pour dernier outrage, de ses vêtements et le fouettèrent sur la place publique. Quelque temps après, Chyliane-Lestrange fut décapité. Les habitants de Privas, en récompense de leur conduite dans cette dernière guerre, obtinrent la restitution de leurs biens et de leurs privilèges. Peu à peu leur ville se releva de ses ruines ; le commerce et l’industrie revinrent se fixer dans ses murs. Ses alentours se peuplèrent successivement de riches fabriques, et les coteaux qui l’avoisinent se couvrirent de plantations de mûriers.

 

Vue partielle de Gap vers 1880 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Carte de Privas et de ses environs
Coin de la carte du département l'Ardèche - Malte-Brun - Atlas - 1880 (?)
(collection personnelle).

Privas n’offre rien de remarquable dans ses constructions. Si l’on en excepte les bâtiments modernes qui ont un aspect agréable, ses maisons sont tristes et grossièrement bâties ; mais ses rues sont propres, bien entretenues, et ses environs riches en sites pittoresques. Nous citerons, parmi ses principaux édifices, l’hôtel de la préfecture, le temple des protestants, le palais de justice et le bâtiment des prisons. Privas possède, en outre, une bibliothèque publique de deux mille volumes. La population du département de l’Ardèche, dont cette ville est aujourd’hui le chef-lieu, s’élève à plus de 364,500 habitants ; l’arrondissement en renferme 117,000 et le chef-lieu près de 4,300. On y fabrique des étoffes de laine et des soies ouvrées ; le commerce y a pour objets la soie, les bestiaux, les cuirs, la houille et les eaux-de-vie. Deux marchés par semaine attirent, en outre, à Privas, un nombreux concours des habitants des villes voisines de la rive gauche du Rhône, qui viennent s’y approvisionner de gibier, de fromage, de beurre, de truffes et de cochons gras. — Le cardinal de Bernis est né au château de Saint-Marcel d’Ardèche, dans l’arrondissement de Privas.


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Zoom sur Entrée de Privas en  1835 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur   Zoom sur Privas dans ses collines vers 1830 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur    Zoom sur Privas, vue générale vers 1850 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur

Zoom sur Les abords de Privas vers 1880 - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur 

 

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