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Texte et gravure Dinan, placé à l’embouchure de la vallée de la Rance, est intéressant par ses jolis points de vue, ses eaux minérales et ses antiquités. Les fortifications de Dinan formaient autrefois une double enceinte. Le rempart extérieur a été remplacé par une promenade. Malgré la difficulté d'assigner une date aux murs qui existent encore, on peut, sans craindre de faire une grave erreur, les rapporter au XIVe siècle. Le château, vu de la campagne, est d’un effet très pittoresque. C’est un énorme donjon, composé de deux tours : deux fossés profonds le séparent de la ville ; on les traverse sur deux ponts, l’un en pierre, l’autre en bois. Ce château a servi souvent de demeure aux ducs de Bretagne qui venaient y passer la belle saison. L’on y montre un fauteuil dont s’est servie la reine Anne. Au village de Lebon, à mille mètres environ de la ville, se voient les ruines d’un monastère. L’église et une partie du cloître sont encore debout; dans l’église, des deux côtés de la nef, il y avait des niches consacrées à des tombeaux. La Révolution, qui les a ouverts, a brisé leurs statues. Dans la petite chapelle qui en est voisine se trouvent, si l’on en croit la tradition, les restes de Beaumanoir qui commandait les Bretons à la bataille des Trente; on remarque, en effet, dans cette chapelle cinq pierres sépulcrales, ornées chacune d’une figure en relief, dont les pieds sont appuyés sur un lion ou sur un oiseau de proie ; mais la seule de ces pierres sépulcrales qui soit accompagnée d’une épitaphe, ne dit rien qui puisse éclaircir la chronique ; on y lit, en effet, qu’elle fut placée sur la tombe du père du prieur de l’abbaye. La Croix du Saint-Esprit, que l’on voit au village de ce nom, est jugée très diversement par les artistes: quelques personnes s’extasient sur la hauteur, sur la légèreté de son support, sur ses sculptures à jour; d’autres déprécient trop un travail très fini, mais qui manque de dessin et d’expression. Nous ne savons si cette sculpture représente l’agonie du Christ ou tout autre sujet du même genre. Parmi les points d’où l’on peut apercevoir la ville de Dinan dans son ensemble. nous citerons le promontoire du Parnasse, où nous avons lu cette épigraphe :
La rivière de Rance, qui passe à Dinan, arrose l’une des vallées les plus pittoresques de la Bretagne ; maintes fois nous avons voulu visiter ses sources, et nous sommes allés dans les immenses landes du Mené, près Moncontou r; mais la fontaine du Chauchivert a constamment absorbé notre attention; en été comme en hiver cette source coule toujours d’un égal volume d’eau ; il y a deux siècles, elle suivait un autre cours, mais un pâtre s’imagina de faire serpenter ses eaux sur les flancs de la montagne, pour les conduire à son village, et depuis lors elles continuent à suivre le lit qui leur a été tracé. Comment s’appelait ce Riquet en guenilles, ce bienfaiteur de la contrée ? Nul ne le sait. Mais, en revanche, on a conservé dans le pays les noms des Bleus et des Blancs qui l’ont ravagé tour à tour en 93, comme s’il était nécessaire de tourmenter ses semblables pour avoir une place dans leurs souvenirs ! Moins élégant, moins hardi, moins large que le pont de Fribourg, le pont de la Roche-Bernard a conquis une grande célébrité; le pont projeté sur la Rance doit laisser bien loin derrière lui tout ce qui a été fait en ce genre ; il se composerait de deux travées réunies par une pile, les travées auraient chacune 450 mètres de portée, ce qui donnerait avec la maçonnerie près de mille mètres ou un quart de lieue pour la longueur totale de ce monument. MM. Chaley et Bordillon seront chargés, dit-on, de cette entreprise, qui attirera de nombreux visiteurs. ***** Le frontispice de l’église de Saint-Sauveur de Dinan est un des rares vestiges laissés par le style roman sur le sol de l’Armorique. On y reconnaît, au premier coup-d’œil, l’époque où la noble architecture de Byzance embellissait de son élégance orientale la sécheresse et la grossièreté de l’art catholique en Occident. Il est fâcheux que cette façade ne soit pas restée vierge de l’empreinte des siècles postérieurs, et que le XVe siècle ait marqué son passage en jetant sur le portail un gable percé d’une fenêtre flamboyante ; car c’est une sorte de mutilation que ces additions profanes aux monuments du moyen-âge, sous le banal prétexte d’un embellissement qui, le plus souvent, est maladroit et de mauvais goût. Il est également fâcheux que le temps, cet inflexible démolisseur des constructions les plus belles, ait peu à peu altéré les précieux ornements légués par le XIIe siècle à l’église de Dinan, et que personne ne se prenne à réparer ou à prévenir ses ravages. Cependant, malgré ses ruineux stigmates, unis à ceux du vandalisme, Saint-Sauveur mérite encore d’exercer le crayon de l’artiste et la plume de l’archéologue. Une large porte en plein cintre, deux arcades simulant des portes latérales, et quelques bas-reliefs, tel est l’ensemble de la façade. Ce qui reste des colonnes et des archivoltes, rappelle tout à fait l’époque byzantine. Quelques-uns des fûts sont torses, et tous sont couronnés par des chapiteaux historiés, c'est-à-dire, couverts d'informes personnages représentant, soit une scène de la Bible, soit quelque pieuse légende. Dans les archivoltes, les rinceaux croisent, entrelacent les épais feuillages des plantes orientales: nombre de statuettes drapées avec la rudesse et la sévérité de l’art néo-grec tapissent les voussures.
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