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Les villes à travers les documents anciens

 

Liège et son histoire jusque vers 1720

 

Liège par William Barlett - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Liège depuis une des collines, par William Henry Barlett
in Vues de la Hollande et de la Belgique par N G Van Kampen, éd. 1836
Gezigt op Luik

 

Extrait de l'ouvrage "Mélanges d'une très grande bibliothèque
De la lecture de livres françois, ... imprimés au seizième siècle"
d'Antoine-René de Voyer, marquis de Paulmy, édition 1786, (collection personnelle)

Texte en vieux françois retranscrit en français moderne avec correction de certains noms propres
Il s'agit donc d'analyse, transcription, résumés... de livres imprimés entre 1500 et 1600, (mais avec des commentaires allant jusqu'en 1780....
)

Avant l'élection des nouveaux évêchés dans les Pays-Bas, faite par Philippe II, le diocèse de Liège était de la plus grande étendue ; car il comprenait, outre le pays de Liège, Maastricht et le territoire d’Aix-la-Chapelle, tout le duché de Limbourg, le comté de Namur, la plus grande partie des duchés de Brabant, de Gueldres, de Juliers, de Luxembourg, et une partie du Hainaut : quoiqu’il soit fort diminué ; il est encore divisé en sept Archidiaconés, qui forment autant de dignités dans la cathédrale.

Le seul pays de Liège renferme quinze cents paroisses : il est divisé en dix grands Bailliages, dont les Baillis ou Drossarts, sont à la nomination du Prince, et toujours gens de qualité. Indépendamment du grand Chapitre de sa cathédrale, il y a dans le pays  vingt collégiales, dont sept dans la ville de Liège seule, deux Chapitres de Chanoinesses nobles, dix-sept abbayes d’hommes, onze de filles : on y compte cinquante-deux principales baronnies, dont quelques-unes ont été érigées en comtés, quinze bonnes villes closes, etc. ; mais la grande division ordinaire et usitée, est en sept contrées, qui font le comté de Looz, celui de Horn, la Hasbaye, la Campine Liégeoise, le Condroz, le marquisat de Franchimomt, et le pays d’entre Sambre et Meuse.

Les états du pays sont composés des trois Ordres ; celui du Clergé, que l’on appelle. l’Ordre primaire, n’est composé que du Chapitre de l’église-cathédrale, et de quelques Prélats qui ont des séances honoraires dans ce Chapitre, L’état noble qui s’assemble au palais   est composé des Barons et Feudataires de l’évêché ; et le Tiers-état, des Bourgmestres de la ville de Liège et des Députés des autres villes, que l’on distingue en  Wallonnes et en Flamandes. Le Prince-évêque y envoyé des Commissaires qui n’ont pas voix délibérative, mais qui veillent à ses intérêts. Le temps de l'assemblée des états n’est point fixé, mais déterminé par les circonstances ou par le changement du Prince-évêque. En se séparant, ils laissent dans Liège des Députés ou Commissaires qui veillent à l’exécution de leurs  résolutions : le Prince y a son Conseil privé, et sa Chambre des Comptes présidés par son Chancelier, et composés chacun de quelques Conseillers. La Cour féodale est composée d’un Président tiré de l’état noble, d’un Vice-Président, et d’une douzaine de Conseillers : la Cour Allodiale juge les différents qui s’élèvent concernant les biens allodiaux ; enfin le Tribunal des Vingt-deux décide les affaires qui regardent les villes. Les Echevins ont la Juridiction ordinaire dans la ville de Liège ; mais on appelle de leurs Jugements à un Conseil supérieur, dont les Membres sont choisis partie par le Prince, partie par les états.

L’air du pays de Liège est tempéré, le terroir fertile : la Meuse, qui traverse ce pays dans toute sa longueur, le rend très commerçant ; on y trouve des mines de fer, de cuivre et de plomb, des carrières d’assez beau marbre, et de la houille qui fait un objet de commerce considérable pour le pays. La ville de Liège s’appelle en latin Leodium : on ajoutait, du temps des Romains, Eburonum, nom des anciens habitants du pays. On croit que le nom latin Leodium est une corruption du mot Legio, parce que ce fut là que les Eburons, commandés par Ambiorix, défirent une légion Romaine et cinq cohortes  commandées par Cotta et par Sabinus. Les Flamands appellent Liège Luyck, et les Allemands Luttick : elle est située dans une vallée environnée de montagnes assez hautes, mais coupées par des vallons assez agréables ; elle jouit de la plupart des privilèges des villes libres te Impériales ; elle n’a point de voix à la Diète de l’Empire. Elle est cependant,  comme tout l’évêché, regardée comme faisant partie du cercle de Westphalie : on la divise en trois parties, dont la première est la ville proprement dite ; la seconde se nomme rifle, parce qu’elle est entourée de tous côtés par différents bras de la Meuse ; la troisième l'Outre Meuse, parce qu’elle est par-delà le principal bras de ce fleuve : elle a jusqu’à dix grands faubourgs.

La cathédrale dédiée à Saint Lambert, est un bâtiment très vaste, mais grossier et massif, J’ai parlé de sa fondation par Saint Hubert, auquel on attribue aussi celle des vingt premiers Chanoines : on croit que S. Florisbert son fils y en ajouta dix autres. Depuis le dixième siècle, ils sont au nombre de soixante, dont seize Dignitaires, après lesquels siègent les Prévôts de quatorze collégiales du pays, et quatre Abbés qui ont des séances honoraires dans le Chapitre. Suivant les anciennes constitutions, il faut, pour y être Chanoine, ou, comme on dit communément, Tréfoncier de la cathédrale de Liège, faire de grandes preuves de noblesse ou être Licencié en Théologie ou en Droit dans quelque célèbre Université, ce qui était autrefois rare et difficile ; mais depuis qu’il est plus aisé d’être, Docteur que Noble, on a limité le nombre des prébendes et des dignités affectées aux Gradués, et ils ne peuvent jamais, être élevés à celles de Prévôt, de Doyen, ni d’Archidiacre. On avait vu autrefois dans ce Chapitre sept fils de Rois, etc. L’Empereur Henri XV en avait été Chanoine dans sa jeunesse, et les Papes Grégoire X et Urbain IV en ont été Archidiacres.
On remarque dans le trésor de la cathédrale, de précieuses reliques, et des reliquaires de la plus grande magnificence : le morceau le plus riche est une statue   équestre d’or massif, représentant Saint Georges ; c’est un présent que Charles le Téméraire, dernier Duc de Bourgogne, fît, en 1471, à cette église, pour témoignage du regret qu’il a voit d’avoir traité cruellement la ville de Liège, en 1468. On y voit aussi une chasuble donnée par le Pape Grégoire X ; la broderie est mêlée de grosses perles fines, entremêlées même de quelques gros diamants : les évêques de Liège la portent dans certaines cérémonies.

Des sept collégiales de la ville, celle de Saint-Pierre, fondée par Saint Hubert, est la plus ancienne ; mais celle de Saint Paul, qui n’est que du dixième siècle, est la plus belle, tant pour l’architecture de son bâtiment, que pour les ornements intérieurs qui, sont de marbre. Les Chanoines de celle de Saint-Martin-au-Mont ont le titre de Chevaliers ; ils sont affiliés à ceux de l’ancienne et belle collégiale de Saint-Martin de Tours ; de sorte que lorsqu’un Chanoine d’un de ces deux Chapitres va dans l’autre, il a place au chœur et voix au Chapitre, suivant son rang d’ancienneté, et retire les rétributions manuelles. La collégiale de Saint-Jean-l'évangéliste est très riche ; elle possède, entre autres, quinze Seigneuries de paroisse. Les trente-deux paroisses de la ville de Liège n’ont rien de remarquable.

Des sept abbayes d’hommes, fondées depuis le dixième jusqu’au treizième siècle, deux sont de l’Ordre de Saint Benoît, une de l’Ordre de Cîteaux, et quatre de Chanoines réguliers de l’Ordre de Saint-Augustin, de différentes réformes. Il y a d’ailleurs quatorze couvents d’hommes, entre lesquels on doit remarquer celui des Dominicains, dont l’église est fort belle ; six autres de Mendiants, Carmes, Augustins, Cordeliers, Récollets, et Capucins. Les Jésuites y possédaient deux maisons ; la plus ancienne avait une très belle église. Les Chartreux avaient aussi un très bel établissement dans un faubourg ; mais il a été enveloppé et presque détruit au commencement de ce siècle par de nouvelles fortifications. Il y a à présent jusqu’à vingt-deux couvents de filles, dont deux abbayes de Bernardines. Quelques-unes de ces Religieuses sont hospitalières, et desservent les hôpitaux, qui sont beaux et bien entretenus. Le séminaire épiscopal a été érigé, en 1589, par Ernest de Bavière ; il est aussi collège pour la Théologie et la Philosophie.

Palais de l'évêque de Liège - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Cour du palais de l'évêque de Liège, par William Henry Barlett
in Vues de la Hollande et de la Belgique par N G Van Kampen, éd. 1836
Het bisschops paleis te Luik

La principale manufacture de la ville est celle des armes à feu : on prétend qu’on y fabrique tous les ans plus de cent mille fusils, pistolets et autres. Il y a dans Liège dix-sept ponts sur la Meuse ; le plus beau, qu’on appelle le Pont des Arches, n’a été bâti qu’au dix-septième siècle, on a élevé au milieu une tour, sur laquelle on a placé du canon ; des deux côtés sont de très beaux quais encore plus modernes. L’évêque-Cardinal, érard de la Marck, avait fait, en 1506, bâtir un très beau palais, qui a subsisté jusqu'en 1734, qu’il fut entièrement brûlé : il a été rebâti depuis avec autant de magnificence. Les états du pays ont contribué à la dépense d’autant plus volontiers, qu’ils s’y assemblent. L’ancienne maison de ville, ruinée par le bombardement de 1691, a été aussi réédifiée ; le Magistrat est composé de deux Bourgmestres et de vingt Conseillers ou échevins, dont deux seulement sont perpétuels ; les autres sont annuels.

J’ai rapporté, dans quelles occasions la ville de Liège avait le plus souffert : au neuvième siècle, elle fut ravagée par les Normands ; au treizième, pillée par le Duc de Brabant ; en 1409, par le Duc de Bourgogne, Jean Sans-peur, qui avait pris le parti de l’évêque Jean de Bavière contre ses peuples ; en 1468, par Charles le Téméraire, aussi Duc de Bourgogne : au dix-septième siècle, il y survint des troubles intérieurs, relativement à l'élection des Bourgmestres, que l’évêque et les Bourgeois se disputaient ; la populace se révolta contre les Magistrats, et se partagea en deux factions, que l’on appela les Chiroux et Grimoux, des noms de leurs Chefs. Ces divisions occasionnèrent de grands désastres, qui durèrent plus de vingt ans. Enfin l'évêque Ferdinand de Bavière, ayant gagné une bataille contre son troupeau révolté, l’obligea à se soumettre ; alors, en 1650, l’évêque fit bâtir une citadelle qui dominait la ville, et, dont on voit encore, du moins, les restes. Pendant le dix-septième siècle et les premières années du suivant, cette citadelle fut plusieurs fois prise et reprise par les Français, les Espagnols et les Hollandais ; elle fut cause du bombardement de Liège en 1691, qui fit éprouver à la ville de grands dommages. En 1701, le Lord Marlborough prit Liège et sa citadelle après un siège en règle. Les Hollandais y tinrent garnison jusqu’à la paix d’Utrecht, et ce ne fut qu’en 1718 qu’ils abandonnèrent Liège, après en avoir ruiné la citadelle.

Fontaine à Liège - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur
Fontaine à Liège, par William Henry Barlett
in Vues de la Hollande et de la Belgique par N G Van Kampen, éd. 1836
Fonteinen te Luik

A peu de distance de Liège, est un prieuré de filles, nommé Cornillon, dans lequel a vécu une sainte Religieuse, appelée Julienne, née dans un village voisin, nommé Retinne. Cette bonne fille eut, à ce qu’on lit dans sa vie, imprimée à Liège en 1598, de grandes révélations, soutint de grands combats contre le Diable, et enfin fit des prédictons et des miracles de son vivant même. Elle fut la première qui pensa à instituer la fête et l’octave du Saint Sacrement, et elle en fit composer l’Office par un jeune Moine. Cependant Julienne fut persécutée, accusée, et obligée de se réfugier successivement dans plusieurs monastères. Elle mourut dans une petite ville de l'état de Liège, à treize lieues de la capitale. C’est dans cette Principauté que l’on a célébré, pour la première fois, la Fête-Dieu ; en 1556, l’année qui précéda la mort de Sainte Julienne ; elle fut enterrée dans une abbaye de filles, nommée Villers, entre la ville de Fosse et celle de Liège. En 1264, le Pape Urbain IV approuva et rendit générale par tout le monde Catholique, l’institution de la Fête-Dieu. Saint-Thomas-d’Aquin perfectionna l'office, commencé sous les yeux de Sainte Julienne. La première Confrérie du Saint Sacrement a été établie à Liège dans l’église collégiale de Saint-Martin ; et dans les Bulles d’indulgences accordées à cette confraternité, en 1539, 1573 et 1575, il est reconnu que c’est dans le diocèse de Liège que cette fête a été instituée.

 

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Liège par William Barlett - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur Fontaine à Liège - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert PousseurPalais de l'évêque de Liège - gravure reproduite et restaurée numériquement par © Norbert Pousseur

 

 

 

 

 

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